Le fonds activiste Amber n'a pas remporté la bataille lors de l'assemblée générale du groupe Lagardère, le 5 mai, mais des questions demeurent en suspens. , @CCO
BUSINESS CASE
Gouvernance : Lagardère sauve son AG mais reste en observation !
Les assemblées générales de groupe coté ressemblent parfois à des feuilletons à rebondissement où les actionnaires deviennent les arbitres de batailles médiatisées. C’est le cas de celle du groupe Lagardère qui s’est tenue à huis clos le 5 mai. Arnaud Lagardère, le gérant de la commandite créée par son père pour piloter le groupe, et le président du Conseil de surveillance, ont écrit une lettre ouverte aux actionnaires le 21 avril. Ils y défendaient leur stratégie et légitimaient la gouvernance en place attaquée par le fonds activiste.
"Amber Capital propose de faire table rase du Conseil de Surveillance et de nommer des membres n’ayant aucune connaissance particulière des métiers du Groupe, dont le processus de sélection n’a fait l’objet d’aucun éclairage et dont l’indépendance vis-à-vis d’Amber Capital n’est pas assurée." Ils ont aussi appelé dans la presse à défendre ce "fleuron du capitalisme français" passé du CAC40 au SBF 120 et qui a perdu beaucoup de sa superbe financière.
Lagardère appelle les renforts
Pour défendre le statut de commandite spécifique au groupe, et les dirigeants, des renforts ont été appelés. Coté administrateurs, Nicolas Sarkozy, ancien président de la République et Guillaume Pepy, ancien dirigeant de la SNCF, ont été cooptés en février au sein du conseil de surveillance. Côté actionnaires, Vivendi piloté par Vincent Bolloré et Fimalac piloté par Marc Ladreit de Lacharrière, auraient pris des participations au capital pour apporter leurs votes aux dirigeants actuels. Ce dispositif a permis à Arnaud Lagardère de repousser l’assaut du dirigeant d’Amber Capital, Joseph Oughourlian, dont le Monde rappelait dans le portrait qu’il lui a consacré le 22 avril qu’il avait une "fâcheuse tendance à sous-estimer le pouvoir des réseaux politco-financiers, en France comme en Espagne".
Ses résolutions ont été rejetées par les actionnaires à 57 % des voix. Ce score est en fait un signal de leur inquiétude sur la direction actuelle du groupe qui n’a pas bénéficié d’un soutien massif. Pour Amber Capital, "les votes montrent le souhait de nombreux actionnaires de voir le groupe se transformer. C’est pourquoi il sera nécessaire de leur apporter des réponses aux questions posées."
Si le conseil de surveillance n’a pas été renouvelé, la question de la transformation de la société en commandite en société anonyme reste d’actualité. Ce régime dérogatoire fait enrager les conseils de vote, à commencer par le président de Proxinvest Pierre Henry Leroy.
Le 1er mai, il dénonçait ce système qui a "conduit la perte de valeur de 40 % du groupe sur la dernière décennie, a pesé entièrement sur les actionnaires". Pour lui, "Lagardère est, disons-le, le fleuron du capitalisme de connivence à la française, celui que tout gouvernement ou régulateur soucieux d’intégrité et d’efficacité financière eut dû depuis longtemps éradiquer."
L’AG de Lagardère a donc bel et bien été une bataille emblématique de Gouvernance. Les investisseurs responsables qui intègrent le G d’ESG, ont été invités à y prendre part dans le cadre de leur doctrine d’engagement actionnarial. Pour les éclairer, l’AMF a publié une communication sur le sujet fin avril. Le régulateur veut ainsi apporter sa contribution au débat et formule plusieurs propositions pour "améliorer la transparence et le dialogue entre émetteurs et actionnaires". La bataille continue.
ARTICLES ASSOCIÉS
Fennel, l’appli qui épingle les assemblées générales des multinationales

A l’Assemblée générale du géant minier Glencore, le charbon au centre de l’attention

Engie : quinze investisseurs déposent une résolution Say on climate à l’assemblée générale de l’énergéticien

Say on climate : l’AMF poussée à réagir sur les résolutions climatiques en assemblée générale
