Veolia, champion de la transformation écologique, voudrait être LA valeur ESG de référence

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Veolia, champion de la transformation écologique, voudrait être LA valeur ESG de référence

Par  Anne-Catherine Husson-Traore | Publié le 06/03/2023

Estelle Brachlianoff qui dirige Veolia depuis juillet 2022, a fait du Capital Market Day organisé au siège parisien du groupe le 2 mars, une démonstration de création de valeur environnementale et financière dans ses trois métiers, eau, énergie, déchets. Elle a conclu en rappelant que son groupe n’est pas récompensé à la hauteur de son engagement, ni sur le plan boursier ni dans sa notation ESG. Analyse d’une décote qui met le doigt sur deux limites de l’ESG actuel : l’absence de valorisation de l’impact réel des activités et l’orientation process des données et des questionnaires de notation.

Véolia fait partie des rares entreprises qui peuvent consacrer leur road show financier à la transformation écologique. C’est ce qu’a décidé de faire Estelle Brachlianoff, la patronne de Veolia, en organisant le 2 mars un Capital Market Day auquel étaient conviés analystes financiers et journalistes. Au cœur de la présentation, les métiers de décarbonation, dépollution et régénération des ressources et les perspectives financières qui s’offrent au groupe dont le directeur financier, Claude Laruelle, pilote à la fois les données financières et les données ESG. Cette présentation originale a le mérite de poser cartes sur table et de rappeler aux analystes financiers que la transformation écologique ouvre des perspectives économiques immenses pour une palette d’activités sur lesquelles Veolia est très bien positionnée. 

La Directrice Générale du groupe a voulu célébrer l’excellente santé de l’entreprise à l’occasion du premier anniversaire du rapprochement avec Suez qui a conduit à l’intégration de 44 000 personnes, ex-Suez. Selon les témoignages, elles et ils se sentent aujourd’hui membres à part entière de Veolia qui compte 220 000 salariés dans le monde, appelés ressources selon le vocabulaire maison, dont le taux d’engagement global est de 89%. 

Développer des solutions écologiques à grande échelle

Présent dans de nombreux pays (à 23% en France, à 40% en Europe et à 37% dans le reste du monde), Veolia veut porter plus loin l’ensemble de ses services utiles à la transformation écologique. "Nous avons fait des résultats historiques, + 14% de chiffre d’affaires en 2022 et +28 % de résultat net. Nous sommes en avance d’un an sur nos prévisions", se réjouit Estelle Brachlianoff. Après huit mois de mandat, elle affiche un bon bilan et une ambition forte. "Tout s’aligne pour que les solutions écologiques soient mises en œuvre à grande échelle. Or Veolia est un acteur mondial qui met ses capacités d’innovation et ses compétences d’ingénierie au service de la transformation écologique dans nos trois métiers phare, l’eau (41% des activités et 17,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires), les déchets (35 % des activités et 14,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires) et l’énergie (24% des activités pour 10 milliards de chiffre d’affaires)", explique-t-elle.

Dans la réunion financière de Veolia, il a longuement été question de dépollution, de déchets toxiques, des PFAS, ces polluants éternels que le groupe travaille à éliminer, mais aussi d’économie régénératrice de ressources.  Les dirigeants avaient à cœur de faire comprendre tout le potentiel de développement de "l’énergie locale décarbonée et décarbonante" à travers la méthanisation, la récupération de chaleur fatale ou encore les microgrids. Mais aussi l’essor du recyclage du plastique passé de 350 kilotonnes en 2019 à 490 kilotonnes en 2022, tout comme le recyclage de déchets dangereux dont Veolia est le numéro un mondial et qui a généré 4,1 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022 (contre 2,5 milliards en 2019).  

"Nos notes ESG comme notre valorisation boursière ne reflètent pas la qualité environnementale de nos services", se désole Estelle Brachlianoff. "Ils sont rendus à nos clients. Donc les émissions que nous contribuons à éviter pour eux ne sont pas prises en compte. Même chose pour le choix que nous avons fait de transformer nos centrales à charbon. Nous aurions pu les vendre pour améliorer notre notation climat mais nous pensons qu’il est plus utile de réduire réellement leurs émissions en transformant leur modèle énergétique". Elle ajoute : "je lance un appel pour que soit reconnu notre impact positif pour l’environnement même si cela implique de changer le modèle de la notation ESG !"

L’angle mort des questionnaire ESG

Car tout le paradoxe est là. La notation ESG est construite sur des questionnaires qui font des moyennes entre les différents critères E, S et G, et n’accordent pas vraiment de bonus axés sur la performance environnementale et/ou sociale de l’entreprise dans le monde réel. Ce que Julien Lefournier, co-auteur de "L’illusion de la finance verte" résume par la formule "Notre maison brûle et nous remplissons des questionnaires ESG". Dans une tribune publiée par l’Agefi Alpha, il dénonce "l’échec de la finance verte qui n’a pas produit d’outil pour favoriser la transition écologique et énergétique".

Sous le feu des critiques depuis plusieurs mois, la notation ESG va devoir expliquer en quoi les entreprises les mieux notées font la différence environnementale et sociale pour l’ensemble de leurs parties prenantes, salariés et utilisateurs en tête. Véolia espère avoir pris une longueur d’avance en démontrant publiquement sa création de valeur environnementale. Les différents régulateurs mettent la pression pour que la finance durable serve vraiment à financer des modèles plus durables et qui peuvent le prouver avec des indicateurs environnementaux concrets et fiables.■


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