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L'ACTU
Facebook, star de la tech, enchaîne les controverses et multiplie les risques ESG
Il s’agit d’une entreprise emblématique de la Silicon Valley. Mais l’enchaînement de controverses qui pèsent sur Facebook la rendent de moins en moins attrayante pour les fonds durables. Les révélations devant le Sénat américain de Frances Haugen, ancienne salariée de Facebook, sur les pratiques du réseau social entament la confiance dans la firme créée par Mark Zuckerberg. Elle est notée 4/5 sur l’échelle des controverses de Sustainalytics. Une note susceptible de le disqualifier pour de nombreux fonds durables qui excluent les entreprises présentant des risques de controverses trop élevés.
Ce risque, de nombreux fonds durables ne semblaient pourtant pas le prendre en compte. Une étude de RBC Capital Market montrait qu’en 2020, les entreprises les plus représentées dans les fonds ESG américains étaient celles de la tech. L’enchaînement de controverses commencent cependant à faire son chemin, le risque posé par une mauvaise gestion des données personnelles devenant de plus en plus matériel pour les investisseurs.
Des sociétés de gestion commencent justement à s’intéresser à de nouvelles stratégies, pour ne pas délaisser totalement le secteur du digital. C’est le cas du fonds Sycomore Sustainable Tech, lancé en 2020, qui s’intéresse aux entreprises technologiques cotées cherchant à avoir un impact positif sur l’environnement et la société, ou bien ayant des pratiques responsables. Les Gafa, notamment en raison de leur gestion des données, ne font pas partie de ce fonds.
Les révélations de ces derniers jours font en effet sonner toutes les alertes des risques ESG (Environnementaux, sociaux et de gouvernance). Frances Haugen a révélé que les algorithmes de Facebook avaient tendance à mettre en avant des contenus dangereux, plutôt que de les censurer. C’était notamment le cas, selon elle, lors de l’attaque du Capitole américain. Celle qui est considérée comme une lanceuse d’alerte a notamment rendu publics des documents internes de la firme qui, selon elle, démontre que Facebook fait passer son intérêt financier avant l'intérêt général.
Une mauvaise nouvelle pour le réseau social n'arrivant pas seule, ces révélations sont intervenues juste après une gigantesque panne ayant affecté les serveurs de Facebook, le 5 octobre. Celle-ci avait fait dégringoler son cours de Bourse de près de 15 % en quelques heures. Il a fallu attendre l'annonce par Facebook, le 18 octobre, de l'embauche de 10 000 personnes en Europe pour développer la technologie du Métavers pour lui redonner des couleurs. Cette technologie n'est toutefois pas sans comporter de risques non plus, si les mêmes pratiques de gestion des données personnelles y sont appliquées.
Risque sur le modèle économique
Mais la controverse née des révélations de Frances Haugen risque de durer. Elle semble au contraire avoir remis en lumière l’offensive du législateur américain pour réguler le secteur de la tech. L’opacité avec laquelle sont gérées les données personnelles des utilisateurs tant de Facebook que des autres géants de l’internet, incite en effet les parlementaires à responsabiliser ces grands groupes. Une proposition de loi est actuellement en cours de préparation pour lever la "Section 30", ce dispositif qui permet d’exonérer les réseaux sociaux de toute responsabilité quant aux contenus diffusés sur leurs plateformes.
Si ce projet de loi aboutissait, il porterait un coup sévère au modèle économique de ces géants de la tech. Jusqu’à présent, les évolutions sur leur gestion de leurs contenus n’ont été que volontaires et, souvent, insuffisantes. Le fond de pension néo-zélandais (New Zealand Super Fund, NZSF) avait mené une coalition d’investisseurs contre les Gafa, suite aux attentats terroristes de Christchurch en 2019. Dans son rapport annuel 2021, il note que les efforts de ces entreprises pour réduire les contenus dangereux sont certains. "Il est toutefois très peu probable que les plates-formes soient capables d’empêcher totalement la diffusion de contenus répréhensibles", déplore néanmoins le NZSF, soulignant les délais trop grands pour classer ces contenus.
La coalition d’investisseurs menée par le NZFS lance donc un message aux différents géants de la tech, dont Facebook, Twitter et Google. Ils leur demandent de poursuivre leurs efforts pour limiter le délai avant la suppression des contenus dangereux et de continuer à faire évoluer les garde-fous. "Chaque actionnaire continuera de surveiller cela comme étant un sérieux risque pour le business", préviennent-ils. ■
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