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L'ACTU
Finance et climat : révolution culturelle ou accélération désordonnée ?
Comment la disruption de la transformation écologique est-elle intégrée par le secteur financier qui repose sur des chiffres et des indicateurs modélisés dans des tableaux excels, intégrés à des algorithmes, et où l’Ebitda est l’alpha et l’oméga de la valeur des entreprises ? La question a rarement été abordée sous l’angle des biais culturels. C’est pourtant ce à quoi s’attaque la première Convention des Entreprises pour le Climat (CEC) dédiée au monde financier lancée le 5 octobre. Le processus de ces conventions est maintenant connu. La CEC Academy a été créée en juillet 2022 pour dupliquer ces parcours de formations et de transformation auxquels ont déjà participé 150 entreprises.
À la Maison des Métallos, le parcours du secteur financier a été présenté devant un amphi plein, avec l’objectif de mobiliser les participants pour "réinventer les modèles d’affaires dans le cadre des limites planétaires et dans la coopération". En résumé : changer les gens en poste aujourd’hui pour qu’ils bousculent leurs propres modèles. La première réunion visait à faire naître une communauté d’acteurs décidés à agir ensemble pour inventer la "finance régénérative". Ils participeront pour cela à cinq sessions entre novembre 2023 et juin 2024. Elles leur permettront à la fois de prendre la mesure de la dégradation environnementale, pour ensuite construire d’autres caps pour modifier en profondeur leurs cibles de financements.
Changer radicalement les modes opératoires
Dans la salle, une soixantaine d’organisations étaient représentées par des directeurs financiers, des gérants d’actifs, des assureurs et des banquiers qui se sont prêtés au jeu avec enthousiasme. L’idée étant de changer radicalement leur mode opératoire et pas seulement de verdir à la marge leurs investissements. Pour les bousculer un peu plus, l’entrepreneur Nicolas d’Hueppe est venu témoigner de la rupture totale qu’a été sa vie après un infarctus gravissime survenu en mai 2021, pendant lequel il est "mort pendant 53 minutes". Avant, il était un homme pressé dirigeant à toute allure une entreprise cotée, marié, quatre enfants et grand sportif. Après il est devenu un homme qui "voit d’autre choses" et donne "au cœur et aux émotions" une priorité absolue.
Le message a visiblement été reçu par la salle qui balançait entre l’idée que le secteur financier ne peut pas changer et l’espoir d’être suffisamment déterminé pour le pousser à le faire. Un des participants a conclu qu’il était sceptique en arrivant mais que finalement "l’énergie collective ainsi créée va permettre de lancer le mouvement". La CEC peut encore embarquer une dizaine de structures dans ce voyage dont les organisateurs espèrent qu’ils reviendront changés.
Faire émerger un modèle entre réindustrialisation et décarbonation
La tâche est immense. Il suffisait pour le mesurer de se rendre à BIG, l’évènement géant organisé par Bpifrance chaque année dans le palais des sports de Bercy où se pressaient 100 000 personnes, mélange hétéroclite d’entrepreneurs de la tech, d’investisseurs, de représentants politiques, de délégations étrangères venues entre autres du Bénin, et de très jeunes gens en quête d’avenir. Les thématiques d’intervention étaient classées en onze enjeux allant de "réussir la transition énergétique" à "bâtir notre metavers", en passant par "créer l’industrie de demain". Le tout rassemblé sous quatre couleurs de coq, le vert pour le climat et le "care", le rouge pour la "French Tech", le bleu pour la "French Fab" et l’orange pour la "French Touch". Difficile de voir émerger un modèle clair qui permettrait de réaliser en même temps la réindustrialisation et la décarbonation de l’économie française.■
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