@Giorgio Viera / AFP
L'ACTU
La Floride, submergée par l’ouragan Ian et gouvernée par Ron DeSantis, farouche adversaire de la finance climat
"Cet ouragan est l’un des cinq plus puissants que nous ayons affronté et nous nous en souviendrons tous", a dit Ron DeSantis, le gouverneur Républicain de Floride en course pour sa réélection. Il voulait ainsi encourager la population à évacuer les zones les plus dangereuses et fuir les conséquences d’une montée des eaux, rapide et spectaculaire. Il n’avait sans doute pas conscience de matérialiser un risque climatique auquel est confronté l’État qu’il gouverne et donc de nager en plein paradoxe !
Car Ron DeSantis est un farouche adversaire de toute prise en compte de critères ESG dans la gestion financière, ce qui inclut l’impact économique et financier du changement climatique. Il accuse cette pratique de ruiner les performances financières des placements, ce qui l’a conduit à interdire au fonds de pension de l’État d’intégrer des critères ESG en août 2022. Matthew Winkler, le fondateur de Bloomberg News rappelle vertement à Ron DeSantis "qu’il est à côté de la plaque puisque tous les placements de la dernière décennie qui n’intégrant pas de dimensions ESG ont des performances inférieures, quelle que soit la période étudiée".
Alors pourquoi tant d’acharnement ? Parce que Ron DeSantis a fait de l’ESG l’étendard de sa croisade "anti-woke", dont il espère qu’elle va l’aider à être réélu. Il s’oppose suffisamment clairement aux droits des minorités LGBT, des femmes et des migrants comme des populations noires et hispaniques, pour que l’ONG "Human Rights Campaign" (campagne droits humains) appelle à voter pour un autre candidat. Elle espère mobiliser "des millions de citoyens pour soutenir les candidats pro égalité, pro avortement et pro démocrates" et faire battre Ron DeSantis. Aux États-Unis, l’ESG est en train de devenir un champ de bataille politique qui nourrit les fractures irréconciliables entre Démocrates et Républicains à l’approche des élections de mi-mandat.
Un État durement affecté par le changement climatique
La Floride est l’un des États symbole du paradoxe américain où l’on tarde à prendre la mesure de l’urgence climatique alors que le pays est ravagé plusieurs fois par an par tous types de catastrophes climatique. C’est à la fois le refuge de Donald Trump puisque sa résidence de luxe de Mar-a-Lago s’y trouve, et un fief de la tendance trumpiste des Républicains qui assume son ESG bashing. Mais c’est, en même temps, l’un des États qui expérimente le plus durement les conséquences du changement climatique. Les assureurs ne veulent par exemple plus assurer les habitations trop exposées du front de mer de Miami.
Dans "Une suite qui dérange", son second film sur le changement climatique sorti en 2017, Al Gore montrait lors d’une de ses interventions que Miami était déjà victime de la montée des eaux. On patauge dans quelques centimètres d’eau dans certains quartiers à chaque saison des pluies et le phénomène s’aggrave chaque année.
Ian est donc venu rappeler à Ron DeSantis la matérialité des risques climatiques. Elle touche tous les secteurs y compris la conquête spatiale puisque la Nasa a dû, à cause de l’ouragan, reporter une troisième fois le lancement de la fusée Artemis. Elle a décidé lundi de ramener ce bijou technologique haut de 98 mètres dans son hangar et a dû pour cela la démonter puisqu’elle était déjà arrimée au pas de tir. Conséquence le lancement est reporté sine die alors que le coût d’une mission de ce type dépasse les 4 milliards de dollars !■
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