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L'ACTU
SFDR, taxonomie, exclusions… les labels européens de finance durable en plein bouleversement
Ils ont toujours autant de succès auprès des sociétés de gestion. Les labels de finance durable européens continuent – certains plus que d’autres – à voir le nombre de fonds labellisés augmenter, selon le dernier panorama des labels réalisé par Novethic. À fin juillet 2023, l’étude recensait 2 733 fonds détenant un des neuf sésames européens. Le label ISR français fait largement la course en tête en nombre de fonds, avec 1 354 fonds, suivi par le Belge Towards Sustainability, avec 771 fonds. Le duo de tête se confirme sur les encours totaux, mais le Belge talonne le Français : le label ISR enregistre 783 milliards d’euros d’encours au 31 juillet 2023, Towards Sustainability, 539 milliards d’euros.
Ces différents dispositifs sont cependant de plus en plus bousculés par la réglementation européenne. Non pas par le projet d’écolabel des produits financiers toujours au point mort, mais plutôt par le SFDR, le règlement sur le reporting ESG des investisseurs. Les sociétés de gestion doivent en effet classer leurs fonds durables sous l’article 8, pour les produits faisant la promotion de caractéristiques environnementales ou sociales, ou article 9, pour les produits poursuivant un objectif d’investissement durable. Une grande majorité des fonds labellisés ont été classés sous l’article 8, la catégorie la moins disante en matière environnementale, l’article 9 réunissant 20% de ces fonds. Le Français Greenfin (notamment audité par Novethic) et le Scandinave Nordic Swan, deux labels verts, sont attribués en majorité à des fonds article 9.
Une confiance relative des épargnants dans les labels
La part verte de ces fonds durables, calculée sur la taxonomie européenne, demeure toutefois encore assez marginale. Une grande partie des fonds labellisés (93% d’entre eux) n’affiche même pas d’ambition d’alignement aux activités de la taxonomie pour leurs clients. Pour ceux-là, la part alignée dépasse tout juste les 5%, quand elle atteint presque les 10% pour ceux déclarant à leurs clients un alignement à la taxonomie.
Cette accumulation d’informations sur les caractéristiques environnementales des fonds risque cependant de ne pas beaucoup renseigner les épargnants qui souhaitent investir leurs économies de manière durable. En France, les sondages réguliers montrent leur intérêt pour financer une économie bas carbone, plus respectueuse de l’environnement et des personnes. Mais soit ils ne connaissent pas les labels, soit ils ne leur accordent qu’une confiance toute relative.
Adresser des signaux clairs aux épargnants
La refonte du label ISR vise justement à y remédier, en renforçant son exigence. Pour la première fois, des critères d’exclusion des énergies fossiles non conventionnelles ont été ajoutés au référentiel. Pour Nathalie Lhayani, présidente du FIR, la réforme du label ISR est plus que nécessaire. "Les allégations de greenwashing sur les produits de finance responsable labelisés, qui ont émergé dans les medias grand public, témoignent de l’urgence d’apporter un label adressant des signaux à la fois plus clairs, plus exigeants en termes de durabilité et plus révélateurs de la diversité des stratégies adoptées par les fonds ISR", explique-t-elle.
Pour l’heure, la balle est dans le camp de Bercy, propriétaire du label. Le ministère de l’Économie et des finances doit valider le nouveau référentiel proposé cet été par le comité du label. Mais de puissantes voix se sont élevées contre les exclusions, des gérants d’actifs estimant que cela contraindrait leur activité et des industriels liés aux énergies fossiles ne voulant pas être exclus des fonds ISR. "L’intégration de grandes entreprises du secteur fossile qui poursuivent les nouvelles explorations et leurs activités dans le secteur des énergies non conventionnelles mettrait à mal la crédibilité du label et irait à l’encontre des attentes des épargnants exprimées sondages après sondages", reprend la présidente du FIR. Un récent sondage commandé par l’ONG Reclaim Finance auprès des Français montrait que 60% d’entre eux ne voulaient pas financer les énergies fossiles avec leur épargne.■
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